đ Il Ă©tait une fois⊠Halloween đŹ
đ Il Ă©tait une fois⊠Halloween đŹ
Il Ă©tait une fois une nuit oĂč la lumiĂšre hĂ©sitait Ă mourir.
Une nuit oĂč les vivants soufflaient sur les braises de lâĂ©tĂ©, tandis que les ombres, Ă pas feutrĂ©s, revenaient hanter la terre des hommes.
Cette nuit portait un nom ancien â Samhain â et plus tard, bien des siĂšcles plus tard, on lâappellerait la fĂȘte dâHalloween.
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đ La nuit oĂč le temps se dĂ©fait
Autrefois, dans les campagnes celtes balayĂ©es par le vent, les druides regardaient le soleil sâĂ©teindre plus tĂŽt, les champs se vider, les bĂȘtes regagner leurs Ă©tables.
CâĂ©tait la fin dâun cycle : la moisson touchait Ă son terme, la vie se repliait sur elle-mĂȘme comme une flamme vacillante.
Mais les anciens savaient que chaque fin cache une promesse de recommencement.
Alors, pour honorer ce passage, ils dressaient des feux sacrĂ©s et partageaient un repas Ă©trange â un banquet pour deux mondes : celui des vivants, et celui des morts.
Les portes de lâinvisible sâentrouvraient.
Les ùmes revenaient errer, affamées de souvenirs.
Pour ne pas les effrayer, on dĂ©posait sur le seuil du pain, des noix, des fruits sĂ©chĂ©s et des lampes dâhuile.
Les plus audacieux, eux, portaient des masques â non pas pour jouer Ă avoir peur, mais pour tromper la mort.
Se dĂ©guiser, câĂ©tait dĂ©jĂ survivre.
đ„ Des offrandes et des flammes
Au cĆur de la nuit, on rallumait le feu du foyer avec une braise venue des collines.
Ce geste, simple et sacrĂ©, disait tout : le feu sâĂ©teint, le feu renaĂźt.
Ainsi allait le monde.
Et sur les tables, dans le craquement du bois et lâodeur du miel chaud, on servait ce que la terre avait donnĂ© de plus humble :
des pommes, des gĂąteaux dâavoine, du chou, du lait Ă©pais, du cidre trouble.
Des nourritures de passage, hĂ©ritage des premiĂšres traditions dâHalloween.
Les druides parlaient alors Ă voix basse de lâannĂ©e Ă venir, des rĂ©coltes, des prĂ©sages.
Et dans les champs endormis, le vent portait encore lâĂ©cho de leurs incantations â
un chant dâadieu Ă la lumiĂšre, un hymne Ă la nuit.
đŻïž Quand les saints se mĂȘlĂšrent aux esprits
Puis vint le temps oĂč lâĂglise voulut dompter les anciens feux.
Samhain devint All Hallowsâ Eve â la veille de la Toussaint,
et la signification dâHalloween se teinta alors dâun voile de foi.
Mais les esprits ne se laissĂšrent pas bannir si facilement.
Ils se cachÚrent sous de nouveaux noms, dans les priÚres des vivants, dans les gestes répétés sans savoir pourquoi.
On priait pour les morts, on leur préparait toujours un repas, on leur laissait une place vide à table.
La tradition survivait, vĂȘtue de foi et de mystĂšre.
Les enfants allaient de maison en maison, demandant des âgĂąteaux dâĂąmeâ en Ă©change de bĂ©nĂ©dictions.
Le sucrĂ© remplaça peu Ă peu le sacrĂ©, mais le sens restait le mĂȘme : donner pour apaiser la peur.
đ Jack, la flamme et la citrouille
On raconte quâen Irlande, un homme du nom de Jack osa dĂ©fier le Diable.
Condamné à errer sans repos, il transportait dans un navet creusé une braise volée aux enfers.
Quand ses descendants traversĂšrent lâocĂ©an, ils trouvĂšrent en AmĂ©rique un fruit plus doux, plus rond, plus dorĂ© : la citrouille.
Câest elle dĂ©sormais qui garde la flamme.
Elle trĂŽne aux fenĂȘtres, rieuse et menaçante â gardienne dâun feu qui ne sâĂ©teint jamais.
Et câest ainsi que naquit lâune des plus cĂ©lĂšbres traditions dâHalloween : la Jack OâLantern, symbole du passage entre les mondes.
đ GoĂ»ter Ă la peur, croquer la vie
Halloween, câest aussi le royaume des saveurs interdites.
La pomme, encore elle â fruit du savoir et du piĂšge.
Le caramel, brûlant et tendre comme une tentation.
Les gĂąteaux aux Ă©pices, les potirons rĂŽtis, les breuvages roux, les soupes Ă©paissesâŠ
Autant de maniĂšres de mordre dans la nuit, de transformer la peur en plaisir, la mort en festin.
Chaque douceur, chaque fumet est une offrande à nos ombres : la peur apprivoisée, le mystÚre goûté du bout des lÚvres.
đ Des collines celtes aux villes Ă©lectriques
Halloween a quitté les landes pour les rues, les chùteaux pour les vitrines.
Elle sâest glissĂ©e sous les nĂ©ons, dĂ©guisĂ©e en fĂȘte populaire, en carnaval sucrĂ©.
Mais si lâon ferme les yeux un instant, au-delĂ des rires et des bonbons, on entend encore autre chose : le battement ancien de la terre, le craquement des flammes, le murmure des morts quâon nâoublie jamais tout Ă fait.
Car les origines dâHalloween rĂ©sonnent encore dans nos gestes modernes.
Cette fĂȘte dâHalloween nâest pas quâun spectacle : câest un miroir tendu Ă nos peurs et Ă nos dĂ©sirs.
Une façon dâapprivoiser ce qui nous Ă©chappe.
đžïž Et si Halloween nâĂ©tait pas quâun jeu ?
Peut-ĂȘtre que dans le souffle du vent dâoctobre, dans la flamme dâune bougie ou le craquement dâune feuille morte, quelque chose de Samhain survit encore.
Une mĂ©moire ancienne, un murmure qui nous relie Ă nos ancĂȘtres, Ă nos saisons, Ă nos rituels.
Car au fond, la signification dâHalloween nâa jamais vraiment changĂ© : elle nous rappelle que toute fin porte en elle la promesse dâun recommencement.
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⚠Le goût du mystÚre
Alors, cette nuit-lĂ , quâon soit enfant ou vieil esprit,
on rallume une bougie,
on croque une pomme rouge,
on trempe ses lĂšvres dans un vin sombre,
et on murmure pour soi-mĂȘme, comme un vieux serment oubliĂ© :
âQue la lumiĂšre me guide dans la nuit,
que la peur se fasse miel,
et que jamais ne sâĂ©teigne le feu.â
đŻïž HECOSBLOG â Chroniques du GoĂ»t : Histoires Insolites
LĂ oĂč le goĂ»t devient symbole, et le rituel, poĂ©sie.









